Avant d’entrer dans le vif du sujet, il est essentiel de rappeler ce qu’est le cognac. Produit exclusivement dans une région délimitée autour de la ville dont il porte le nom, le cognac est une eau-de-vie de vin distillée deux fois dans un alambic charentais. Mais tous les cognacs ne naissent pas sous les mêmes cieux. La région de production se divise en six crus distincts : Grande Champagne, Petite Champagne, Borderies, Fins Bois, Bons Bois et Bois Ordinaires.
Cette dénomination en « crus » n’a rien à voir avec les notions de grands crus dans le vin. Ici, cela désigne des zones géographiques dont les sols et sous-sols confèrent des profils aromatiques spécifiques aux eaux-de-vie qui en sont issues. Ce cadre est structuré par l’Appellation d’Origine Contrôlée (AOC), définie en 1936, et encadrant également la durée du vieillissement, les cépages utilisés (principalement l’Ugni Blanc) et bien d'autres aspects techniques.
Un cognac de cru, parfois appelé « cognac de terroir », est issu d’un seul des six crus définis par l’AOC. L’idée derrière cette notion est de laisser la singularité d’un terroir unique s’exprimer dans l’eau-de-vie sans la mélanger avec celles provenant d’autres zones. En quelque sorte, il s’agit du cognac dans sa forme la plus pure, un hommage direct à la terre d’où il provient.
Les cognacs de cru sont parfois considérés comme plus exigeants ou singuliers, car ils ne jouent pas sur la complémentarité d’autres crus pour atténuer d’éventuelles aspérités.
À l’inverse du cognac de cru, le cognac d’assemblage, ou « blend », puise sa richesse dans la diversité. Ici, le maître de chai endosse le rôle d’un véritable compositeur, combinant des eaux-de-vie issues de différents crus pour atteindre un équilibre parfait.
L’assemblage permet de jouer sur les complémentarités des différents territoires pour créer un produit cohérent, harmonieux et fidèle à une signature maison. Prenons l’exemple suivant :
Le maître de chai peut ainsi conjuguer toutes les forces de la région et transcender les limites d’un seul terroir.
Les cognacs d’assemblage se déclinent en une infinité de styles, selon plusieurs facteurs influençant le résultat :
C’est cet art de l’assemblage qui fait la renommée des grandes maisons comme Rémy Martin, Hennessy ou Martell, dont certaines assemblées gardent une recette inchangée depuis des décennies.
Il n’est pas question ici de dire que l’un est intrinsèquement supérieur à l’autre. Tout dépend de ce que vous recherchez dans un cognac. Voici quelques éléments pour vous guider :
Le cognac de cru et le cognac d’assemblage ne sont pas en opposition, mais incarnent deux facettes d’un art vieux de plusieurs siècles. Le premier sublime le terroir et sa singularité, tandis que le second exalte l’expertise humaine et la créativité. Entre la poésie d’un cru unique et la symphonie d’un assemblage, le choix n’est finalement pas une question de supériorité, mais d’envie du moment. Dans tous les cas, ces deux approches garantissent une chose : une invitation au voyage à travers les terres, les savoir-faire et les saveurs de la Charente. Une raison de lever son verre et d’apprécier, avec lenteur et gratitude, le travail d’hommes et de femmes qui, crus ou assemblages, défendent une tradition vivante.