Le secret du cognac : les cépages qui façonnent un spiritueux d'exception

18 mai 2025

Quels sont les cépages autorisés dans la production du cognac ?

Le cognac, comme tout produit d'appellation d'origine contrôlée (AOC), est soumis à une réglementation stricte. Huit cépages sont autorisés pour la production de ce spiritueux, mais en pratique, un seul domine largement le paysage : l’Ugni Blanc.

L'Ugni Blanc : le roi des cépages du cognac

Issu de la famille des cépages blancs, l'Ugni Blanc – appelé Trebbiano en Italie – représente à lui seul plus de 98 % des surfaces viticoles dédiées à la production du cognac. Pourquoi cet écrasant monopole ? Tout simplement parce que l'Ugni Blanc possède des qualités particulièrement adaptées à la distillation :

  • Une forte acidité : essentielle pour la conservation des vins avant distillation.
  • Un faible degré alcoolique : qui permet de produire des eaux-de-vie d’une grande finesse.
  • Une maturité tardive : elle garantit des vendanges riches en arômes complexes.

L'Ugni Blanc s’adapte aussi très bien aux terroirs calcaires de la région, ce qui contribue à la qualité exceptionnelle des cognacs produits dans les crus les plus réputés tels que Grande Champagne ou Borderies.

Les cépages secondaires : une diversité en retrait

Bien que l’Ugni Blanc règne en maître, d'autres cépages sont également autorisés par le cahier des charges de l’AOC :

  • Folle Blanche : Historiquement, elle était le cépage dominant avant d'être largement remplacée par l'Ugni Blanc après l'épidémie de phylloxéra, à la fin du XIXe siècle. Elle est connue pour apporter finesse et élégance, mais sa faible résistance aux maladies en limite aujourd'hui l'utilisation.
  • Colombard : Ce cépage, plus aromatique, est utilisé de façon marginale mais peut renforcer les notes fruitées et épicées dans certains assemblages.
  • Montils, Sémillon, Jurançon blanc : Ces cépages sont encore moins présents, mais leur contribution reste réglementairement possible.

Ces cépages secondaires sont le plus souvent utilisés par des producteurs souhaitant expérimenter ou offrir des profils uniques, mais leur impact global reste très modeste au regard de la suprématie de l'Ugni Blanc.

Pourquoi l'Ugni Blanc est-il si omniprésent dans le cognac ?

L’omniprésence de l'Ugni Blanc peut s'expliquer par une combinaison de facteurs agronomiques et qualitatifs, mais aussi historiques. Le cépage s’est imposé à partir du XXe siècle pour répondre aux besoins de durabilité et d’efficacité dans une production soumise à des contraintes techniques fortes.

Sa capacité à produire un vin stable, faiblement alcoolisé et riche en acidité est essentielle dans le processus de double distillation charentaise. En effet, l’objectif n’est pas ici de produire un vin buvable, mais une matière première parfaitement adaptée à la transformation en eaux-de-vie. L’Ugni Blanc répond à cette exigence avec une constance remarquable, même sur plusieurs millésimes difficiles – un atout clé pour des spiritueux qui peuvent vieillir plusieurs décennies.

Terroir et cépages : la symbiose essentielle

Dans la région du cognac, le terroir joue un rôle fondamental dans l'expression des cépages. Le sol calcaire, caractéristique des meilleurs crus comme Grande Champagne ou Petite Champagne, apporte une typicité unique aux vins distillés. En revanche, les crus périphériques – Fins Bois, Bons Bois et Bois Ordinaires – peuvent varier en composition de sols et en nuances aromatiques, ce qui se traduit aussi par une structure différente dans les cognacs.

Les cépages, notamment l'Ugni Blanc, sont donc intimement liés au terroir. Si un cépage secondaire comme la Folle Blanche exprime une grande finesse et une palette aromatique plus fleurie sur certains sols, il ne rivalise pas avec la robustesse et la fiabilité de l'Ugni Blanc sur les grands crus calcaires. Chaque cru magnifie ainsi différemment le cépage principal, apportant des variations subtiles qui se révèlent à la dégustation des cognacs issus de ces terroirs.

Quelles sont les influences des cépages sur le profil aromatique du cognac ?

Le cépage utilisé impacte directement les arômes et le style du cognac produit. C’est lui qui détermine la palette initiale, avant que la distillation et le vieillissement n’y apportent toute leur complexité.

  • Avec l'Ugni Blanc : Les eaux-de-vie sont généralement vives, avec une dominante de fruits blancs (pommes, poires), parfois accompagnée de touches florales légères. Elles offrent une base idéale pour un vieillissement prolongé en fût de chêne.
  • Avec la Folle Blanche : Les cognacs peuvent révéler des notes plus florales et délicates, mais leur fragilité technique a limité leur présence sur le marché.
  • Avec le Colombard : Ce cépage apporte souvent une certaine rondeur et des arômes plus exotiques, bien qu’il reste cantonné à des usages marginalisés.

Ces variabilités rendent la dégustation d’un cognac passionnante, chaque maison adoptant ses propres choix en matière de cépages et d’assemblages.

Une tradition en évolution ?

Si l’Ugni Blanc demeure le pilier indétrônable de la production de cognac, certains producteurs explorent de nouvelles voies. Il existe notamment un intérêt croissant pour une réintroduction modeste de cépages oubliés comme la Folle Blanche, dans une démarche de préservation des traditions et de diversification aromatique. Cette tendance, encore marginale, pourrait ouvrir la voie à des cognacs au profil plus varié, répondant à une demande accrue pour des produits artisanaux et authentiques.

Par ailleurs, des expérimentations autour de cépages résistants aux maladies, capables de mieux s’adapter à des changements climatiques, commencent à éclore. Si elles ne bouleversent pas le paysage actuel, elles témoignent d’une prise de conscience des enjeux environnementaux et d’une volonté de faire évoluer en douceur cette appellation d’exception.

Au final, les cépages utilisés pour produire le cognac sont autant une affaire de tradition que d’évolution. Ils incarnent une quête perpétuelle d’équilibre entre respect du passé et adaptation aux défis de demain. La prochaine fois que vous dégusterez un cognac, pensez à ces grappes d’Ugni Blanc – ou peut-être de Folle Blanche – qui, bien avant l’alambic et le chêne, posent les premières pierres de l’œuvre que vous savourez.

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