Comment fabrique-t-on du rhum de mélasse ?
1. La dilution
La première étape consiste à diluer la mélasse. En effet, la mélasse, à son état d’origine, est trop visqueuse et concentrée en sucre pour une fermentation optimale. Elle est donc mélangée avec de l’eau pour obtenir une solution liquide, que certains appellent le "wash". Le taux de dilution et la qualité de l’eau utilisée peuvent déjà influencer le caractère final du rhum.
2. La fermentation
C’est dans cette étape clé que la magie opère. Les sucres contenus dans la mélasse sont transformés en alcool grâce à l’action de levures. La nature des levures (cultures spécifiques ou levures indigènes) et la durée de fermentation jouent un rôle majeur dans le profil aromatique du rhum.
Les fermentations rapides, qui durent souvent entre 12 et 48 heures, donnent des alcools légers et fruités. À contrario, certaines distilleries privilégient des fermentations plus longues, parfois jusqu’à une semaine, permettant le développement d’esters et d’arômes plus complexes. Ce processus, bien qu’invisible, est l’un des secrets de fabrication les mieux gardés par les producteurs de rhum.
3. La distillation
Une fois la fermentation achevée, le "wash" fermenté est distillé pour extraire l’alcool. Deux types d’alambics sont principalement utilisés :
- Les colonnes à distillation continue : Elles permettent une production plus abondante et donnent des rhums plus légers, souvent utilisés comme base pour les rhums blancs ou les blends.
- Les alambics pot still : Typiques des productions artisanales, ils permettent de conserver davantage d’arômes complexes. Ils sont prisés pour les rhums de caractère.
La distillation est aussi l’étape où les "têtes" (fractions les plus volatiles) et les "queues" (fractions lourdes) sont séparées pour ne conserver que le "cœur de chauffe", riche en arômes et en alcool pur.
4. Le vieillissement et l’assemblage
Une fois distillé, le rhum peut être mis en vieillissement. Les distilleries de rhum de mélasse jouent souvent avec une grande variété de fûts : ex-fûts de bourbon, fûts de chêne français, ou encore des fûts ayant contenu du porto ou du sherry. Ces variations apportent des touches uniques au produit final.
Dans les Caraïbes ou en Amérique centrale, le vieillissement s’effectue sous un climat tropical, où l’évaporation de l’alcool (la fameuse "part des anges") est rapide, et où les rhums gagnent en intensité aromatique en seulement quelques années. Un rhum vieilli 5 ans sous les tropiques peut rivaliser avec des whiskys de plus de 15 ans vieillis en Écosse. La clé ? La chaleur et l’humidité.
5. L’embouteillage
Dernière étape, mais non des moindres : certains rhums sont embouteillés tel quel, parfois même à leur degré brut de fût, tandis que d’autres sont dilués avec de l’eau pour atteindre un degré d’alcool consommable (souvent entre 40 % et 55 %). À ce moment, certains producteurs ajoutent du sucre ou des arômes, une pratique controversée mais autorisée dans de nombreuses régions du monde.